lundi 17 septembre 2018

La Larme

    extrait pastel




La Larme

Il a versé sa dernière larme à l’horizon sans tâche.
Un goéland a suivi la ligne plate que sa vision attache.
Quand son cœur s’est ouvert à la vue de la voile blanche,
Qui l’a guidé vers l’île magique des minarets du silence.
Parmi le coulis des vagues, il a bu le vent à petites gorgées,
Pour ne pas s’évanouir devant tant de beauté.
Le temps s’écoule depuis son départ,
Comme le sablier obstrué en son fin passage au milieu étriqué.
Les secondes suffoquent une à une avec difficulté.
Un petit grain de sable, tombe.
Solitaire dans son verre, il attend l’autre.
L’autre grain, l’autre seconde.
L’autre tout court, sans aucun apôtre.
Seul, il résiste au temps qui passe, qui dépasse, qui surpasse tout.
Retourner en arrière, percevoir un hier crucifié, empalé.
Entendre la musique d’un trop plein qui déborde du tout.
De ces gens qui politisent, qui filment, qui photographient,
De ces gens qui parlent fort, qui regardent mal, qui se regardent.
Oh! oui, Qui se regardent, mais qui ne disent rien au fond,
Sur ces choses importantes de la vie qui blesse.
Une souffrance en errance, une rencontre avec la détresse.
Un enfant marqué par la violence d’une existence déjà en laisse,
Faite d’ignorance, de mépris, d’indifférence.
Un enfant déjà vieux d’expériences, 
qui pleure.
Le manque d’amour, le manque de tendresse et de tout.
Le manque de tout et de tout ce mépris posé sur la misère humaine.
De tous ces regards visqueux, inquisiteurs et intolérants.
De tous ces yeux avides, sans doute et sans scrupule.
Qui toisent, qui jugent, qui assassinent.
Amour, tolérance. Vaine utopie d’une époque ignorant le rampant.
Comme tous ces cafards de demain croisant les doryphores d’hier.
Comme un grand tonnerre annonciateur d’un éclatement trop fort.
D'une révolte qui gronde, d’une peur qui fait peur.
Du courage de dire non, avant qu’il ne soit trop tard.
Du courage de parler librement aux autres,
Avant de devoir vivre la méfiance au quotidien.
Sentir un grand frisson parcourir nos corps, comme si c’était vrai.
Vivre l’instant présent en réalisant le danger qui menace.
Percevoir l’aigle qui rode dans l’espace. Se projeter sur l’écran géant.
Observer les visages tristes, inquiets, les gestes contenus, bloqués.
Toucher les âmes embrumées dans ce vaste magma opaque.
Ce temps est là. Il nous happe vers la spirale de l’île de Pâques.
Ces longs mots d’amour vont du billot à la hache, entendons-nous?
Le vent les porte. Changeons ce tout, gardons espoir et aimons-nous.
Jour sacré que nos visions attachent,
Arc-en-ciel doublé vibrant de la larme.
Sa larme qu’il a versé sur l’horizon sans tâche.
Ninaïe PRIGENT  2002
extrait de série pastel


2 commentaires:

Chanson printanière a dit…

Ton texte est magnifique, un cri à l'humanité pour un amour vigilant des grands cataclysmes humains... de ses vautours qui rodent et détruisent sur le passage, les valeurs essentielles à la vie... il remet en place, notre relation avec l'autre... celui ou celle qu'on connait ou que l'on découvre...
Je te souhaite une belle journée, j'ai passé un bon moment en te lisant, sous l’œil de cette magnifique peinture,
Amitiés,
Robert.

Françoise Patte a dit…

Quel beau texte Ninaie j’ai pris un énorme plaisir à te lire et je suis partie en voyage...Sous cet œil qui m’hypnotise toujours merci à toi , amicales pensées ...